Après la méditation pleine conscience, place à l’activité pleine conscience !

Série Esprit Critique : 10 façons de voir le travail autrement proposées par 10 collaborateurs.

Raja Fassi, ergonome consultante, nous parle du mal que nous faisons parfois à nos corps au travail sans le savoir et des effets pervers  du bureau flex…

Raja FASSI
Consultante ergonome

Il suffit de passer une heure dans un grand magasin suédois pour se le rappeler : une grande partie de la sphère domestique s’organise autour de notre bien-être.

Les objets prennent soin de nous. Les meubles se placent à la bonne hauteur pour nous faciliter les gestes du quotidien. Le dévidoir à essuie-tout nous offre de le dérouler facilement vers le bas. Le lave-vaisselle prend de la hauteur pour nous éviter de nous courber. Bref, les designers redoublent d’ingéniosité pour que nos corps vivent bien leurs journées.

Bien sûr, même à la maison, certaines postures peuvent nuire à la longue. Ceux qui pratiquent de longues vaisselles en position debout ou qui passent beaucoup de temps assis dans le canapé devant la série du moment ou au volant le savent bien. Mais la sphère domestique a grandement évolué pour prendre soin de nous.

Et celle du travail ? Des efforts ont été fait et nous avons amélioré certaines choses, mais il existe encore une très grande marge de progrès. Comme nous le démontre Raja, il y a encore du chemin !

L’homme est une pièce rapportée au travail

Sans homme, pas de travail.

Pourtant, et c’est là tout le paradoxe, le monde professionnel n’est pas conçu autour de lui. Plus précisément, les systèmes de travail ont peu pris en compte le fonctionnement du corps humain dans leur conception.

Ils sont d’abord pensés autour de notions de tâches, d’informations, ou encore d’outils ou de logistique. Ils sont souvent conçus pour optimiser les temporalités, raccourcir les flux, etc. Et une fois tout ceci validé, on vient parfois y greffer des paramètres liés à l’homme.

Mais globalement, il faut se le dire, ils ne sont pas conçus pour respecter son épaule ou lui permettre de conserver une vision impeccable le plus tard dans sa vie…

Ces gestes anodins qui nous plombent

L’écran d’ordinateur trop bas qui fait travailler les cervicales démesurément. La hauteur des racks en entrepôt et l’accès du produit vers le haut inscrivant l’épaule dans une position délétère. Ou encore l’activité assise tout au long de la journée des semaines et des années , qui nie la courbure naturelle du dos.

Trop confiants dans les vertus ergonomiques de nos systèmes de travail, on ne se doute pas de tous les facteurs qui peuvent induire une posture viciée. Résultat, on ne prend pas le temps de s’y intéresser sur le moment. Pourtant nous rappelle Raja, les pathologies occasionnées, elles, peuvent durer toute  une vie.

Soyons alertes !

Que les positions adoptées compensent un problème existant, ré-insistent dessus ou en créent un nouveau, ces postures délétères présentent toutes le même défaut : on ne les voit pas. Par leur nature, puisqu’elles travaillent la résistance du corps à la longue en s’inscrivant dans nos habitudes de travail, on ne s’en rend compte que trop tard, lorsque la douleur est apparue… 

Avez-vous par exemple remarqué comme on règle spontanément sa selle de vélo alors que l’on prend rarement le temps de régler la hauteur de son siège au bureau ? Pourtant, on passe plus de temps sur l’un que sur l’autre !

C’est bien parce que l’on a encore trop peu conscience de nos postures au travail et des adaptations qui seraient requises pour une bonne ergonomie, qu’on ne met pas en place ce qui serait pour nous salutaire.

Prenons le temps de prendre soin de nous ! Mais comment ? Par l’entreprise, déjà, qui se fait de plus en plus sensible à la question et mobilise des formations telles que celles que dispensent Raja. Elle y éveille chacun sur le fonctionnement naturel de son corps et ses limites pour tenter de pallier les contraintes du système de travail, les avoir à l’esprit, respirer… Ainsi lors des sessions pratiques, Raja réinterroge nos gestes et nos postures pour nous inviter à une « activité pleine conscience »  ou l’on marie respiration, mouvement et activité…

Les bureaux flex , sont-ils une fausse bonne idée ?

Il faut apprendre à questionner nos habitudes anciennes, mais aussi les nouvelles. Car toutes les innovations ne cachent pas une ergonomie réfléchie, loin s’en faut.

Ainsi les bureaux flex, séduisants par la notion de partage et de mobilité qu’ils amènent, supposent par nature un espace qui n’est pas calibré pour le collaborateur, puisque ce n’est plus le sien. Derrière un progrès apparent peut se trouver un recul en matière d’ergonomie…

Alors ?

Alors c’est seulement en ayant conscience de ces notions qu’il deviendra possible de devenir soi-même acteur de son bien-être au travail et de faire évoluer les systèmes de travail comme ont déjà évolué les cuisines, les vélos ou les salles de bain ! On se retrouve dans 10 ans, pour voir ?